NYSTAGMOMÉTRIE SUBJECTIVE


Jean-Bernard WEISS
(Paris)

Sauf d’avoir examiné un très grand nombre de patients nystagmiques, l’étude clinique est insuffisante pour analyser avec précision les principaux paramètres du nystagmus qui sont sa forme, son amplitude et son mode de localisation.

L’examen électronystagmométrique (E.N.G.) apporte des précisions sur les deux premiers paramètres, et l’étude ophtalmoscopique de la fixation montre le mouvement de dérive et de rattrapage par rapport à la position primaire. Ces examens sont objectifs.

La nystagmométrie subjective, que nous avons décrite en 1968, repose sur une particularité connue des sujets présentant un nystagmus congénital: dans les conditions habituelles d’éclairage, ces sujets n’ont pas d’oscillopsie. Par contre en éclairage intermittent, ils perçoivent une succession d’images séparées. Ceci est démontré en faisant regarder à un tel patient une lampe témoin au néon qui s’allume et s’éteint 100 fois par seconde; il perçoit une succession de points lumineux. Le même effet est obtenu avec des diodes électroluminescentes (D.E.L.) que l’on commande avec facilité par des circuits de logique T.T.L. alimentés sous une tension de 5 volts.

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Figure 1
: Un sujet nystagmique, regardant un point lumineux intermittent, perçoit une rangée de points

Dans ce qui suit, nous supposerons que le patient présente un nystagmus horizontal.

Mesure de l’amplitude du nystagmus
Deux lumières intermittentes sont présentées dans une relative obscurité, de préférence de couleurs différentes. Le sujet perçoit deux séries de points.

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Figure 2
: Le sujet nystagmique regarde deux points lumineux intermittents; les deux rangées de points rouges et verts sont séparées. L’écart entre les deux diodes électroluminescentes est supérieure à l’amplitude du nystagmus.

On fait alors varier la distance séparant les deux lumières en sorte que les deux séries de points lui paraissent se toucher (Figure 3). L’amplitude du nystagmus est alors égale à E, écart séparant les deux lumières; connaissant D, la distance d’examen, l’amplitude angulaire est donnée par :

 tangente A = E / D

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Figure 3
: Les deux rangées de points verts et rouges semblent se toucher. L’écart séparant les deux diodes électroluminescentes est égal à l’amplitude du nystagmus.

Formes du nystagmus
On dispose verticalement une rampe de diodes électroluminescentes allumées successivement de bas en haut (Figure 4).

En cas de nystagmus pendulaire, ces points paraissent disposés sur une sinusoïde verticale (Figure 5 b). En cas de nystagmus à ressort, la forme est celle de dents de scie (Figure 5 a et 5 c).

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Figure 5

Pour faciliter la description de ce qu’il perçoit, il est commode de présenter au patient les trois schémas possibles dessinés sur un carton. Dès l’âge de cinq ans, les enfants répondent avec précision.

"Mode de localisation"
Les patients présentant un nystagmus congénital n’ont pas d’oscillopsie.

Puisque l’image bouge sur la rétine, ils ont un mode particulier de localisation.

Il serait intéressant de préciser ce mode de localisation.

Le dispositif d’analyse comporte deux points lumineux, disposés l’un au dessus de l’autre, un étant continu et l’autre intermittent.

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Figure 6
: Le sujet nystagmique regarde deux points lumineux superposés; le point du haut est continu; celui du bas est intermittent et est perçu comme une rangée de points.

On demande au patient de préciser la position de la série de lumières par rapport au point lumineux constant. Là encore, des schémas dessinés lui permettront de préciser ce qu’il perçoit (Figure 7).

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Figure 7
: Analyse du "flash perceptuel"
A Nystagmus pendulaire. B Perception intermédiaire. C et D perception en bout de course.

Technologie
L’utilisation de diodes électroluminescentes associées à des circuits logiques T.T.L. permet de réaliser à peu de frais de tels montages, qui sont à la portée d’un amateur éclairé. N’importe quel étudiant en électronique est capable de les réaliser.

Pour la mesure de l’amplitude du nystagmus, la fréquence d’allumage doit être voisine de 50 cycles par seconde. Pour une rampe de 64 diodes, la période doit être de 0,5 seconde (allumage successif des 64 diodes en 0,5 seconde). Pour l’étude du "flash perceptuel", l’allumage du point lumineux intermittent aura un cycle de 50 hertz.

Utilisation clinique
Dès l’âge de cinq ans, les enfants nystagmiques donnent des réponses fiables. La nystagmométrie subjective permet au spécialiste qui ne dispose pas d’un appareil d’ E.O.G. d’étudier ses patients nystagmiques avec une précision qui, à notre avis, dépasse celle des méthodes objectives.

Terminologie
Le terme de "mode de localisation" devra certainement être changé.

Chez un sujet normal, un objet situé en position primaire est localisé "tout droit", quelque soit la position de l’œil fixateur; en particulier quand l’œil est en position primaire et fixe l’objet. Dans ce cas précis, l’axe de fixation, l’axe visuel et l’axe de localisation sont confondus.

Chez un sujet présentant une paralysie oculomotrice partielle et récente d’un œil, quand l’œil paralysé est fixateur, un objet situé en position primaire n’est pas localisé "tout droit" : c’est le phénomène de "past pointing". Quand le sujet fixe un objet en position primaire, l’axe de fixation et l’axe visuel sont confondus, mais l’axe de localisation est différent des deux axes précédents.

Chez un sujet présentant une amblyopie ancienne avec fixation excentrique, quand le sujet fixe de son œil amblyope un objet situé en position primaire, l’axe de fixation et l’axe de localisation sont confondus mais ils sont différents de l’axe visuel.

Chez un sujet nystagmique, il n’y a pas de trouble de localisation important; mais l’axe visuel se déplace constamment. Comment s’organise la localisation ?


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(Dernière mise à jour de cette page le 28/05/2006)